Prendre le train au Japon (Partie 3)
Pour rejoindre l’île de Kyushu et en faire le tour, nous prendrons le train. Certains seront rapides comme des flèches argentées, d’autres seront mignons, peints en jaune ou rouge, certains seront plus lents roulant sur une voie unique, rappelant un monde ferroviaire depuis longtemps révolu en Europe.
Comme certains le savent, j’aime les trains. Ça tombe bien, les Japonais aussi ! Il existe une ribambelle de trains classiques et touristiques à faire tourner la tête des passionnés. Si vous voyagez au Japon, il y aura de grandes chances que vous les emprunterez. C’est un moyen pratique pour se déplacer. Le réseau est dense et permet de rejoindre presque chaque recoin du pays. Comme partout dans le pays, les services sont rendus par des travailleurs en uniforme, gantés et tirés à quatre épingles.
Avant de monter dans un train, vous devez passer par la gare. Là aussi, les Nippons savent en prendre soin. Chez nous, les distributeurs automatiques remplacent l’humain dans la majorité des points d’accès. La gare n’est plus qu’un lieu de passage froid et sans âme. Au Japon, la station joue un rôle dans la cité. Elle représente plus qu’un simple endroit où le voyageur monte et descend de son train. Le voyageur peut acheter son billet, s’y restaurer, il trouvera des restaurants de toutes sortes. S’il va rendre visite à un proche, il trouvera de quoi offrir un présent à son hôte. C’est une marque de respect très appréciée. Dans les grandes villes, les gares sont de véritables centres commerciaux. C’est un lieu de vie intense. Même dans les endroits reculés, les dessertes sont assurées de manière régulière et ponctuelle. N’arrivez pas à l’heure à la gare, arrivez en avance, les trains partent (quasiment) toujours à l’horaire prévu. La ponctualité est la règle, si un train a du retard, c’est généralement un accident de personne qui en est l’origine.
Le réseau japonais se structure en deux parties. La première est le réseau domestique. Ce sont les lignes historiques. Elles ont été conçues par les Anglais au XIXe siècle. Si l’on observe attentivement les rails, vous remarquerez que les voies sont plus étroites qu’en Europe. En effet, ce réseau était déployé dans les pays qui ne représentaient pas, à la vue des Anglais, un potentiel économique important. C’était un réseau de deuxième division. De plus, loin de représenter un handicap, c’est une force. Les réseaux à voies étroites permettent des virages plus serrés. Dans un pays montagneux, c’est un atout non négligeable. La seconde est le réseau Shinkansen, le TGV japonais. Sur des voies larges, il a son réseau propre. Il connecte les villes principales du pays à une vitesse moyenne de 300 km/h dans un confort de silence et de stabilité étonnante. Là où le TGV ou l’ICE allemand ballotte, et bouge de manière latérale, le Shinkansen étonne par sa stabilité. Le design profilé, son blanc éclatant, son nez en bec de canard et ses fenêtres en forme de hublot d’avion donnent l’impression d’un avion sur rail. La dernière particularité est que le voyageur sera toujours assis dans le sens de la marche. Les sièges pivotent en fonction du sens de la marche du train..
Un autre usage est complètement différent, le contrôle du billet. Dans un Shinkansen, si vous avez réservé une place, le contrôleur ne demandera pas à le voir. Il consultera sa tablette et pourra voir directement si une personne n’est pas à sa place. Si tout est en ordre, il ne vous dérangera pas. Si vos bagages ou le passager ne sont pas placés à la bonne place, il viendra gentiment et poliment (mais avec une certaine fermeté) vous demandez de les placer à l’endroit approprié. Ne vous étonnez pas de voir le personnel du train saluer à chaque entrée et sortie du wagon. Si vous avez acheté un « Japan Rail Pass », la réservation des places est incluse dans le prix. Ne vous privez pas de cet avantage, c’est la certitude que vous pourrez voyager. Les trains peuvent être très fréquentés à certaines heures de la journée. Vous pouvez réserver des sièges également dans les trains locaux ou limited express (train express régional). Il faut réserver vos places aux guichets ou dans certains distributeurs automatiques. Faites attention, les trains touristiques sont prisés et réservés longtemps à l’avance. Si vous voulez prendre un train en particulier, réservez-le rapidement à votre arrivée.
Une très belle ligne que nous avons emprunté, la ligne « Hohi » qui relie Oita à Kumamoto est un peu spéciale, au contraire d’autres itinéraires qui longent les côtes, celle-ci parcourt l’île en son centre et passe par l’impressionnante caldera du volcan d’Aso. D’abord d’un profil plat, on passe dans les rizières et les champs de fleurs. Les petites gares se succèdent. Ensuite, la voie se fait plus sinueuse, le petit train jaune grimpe courageusement les côtes abruptes pour redescendre dans la plaine ceinturée par les montagnes et dominée par le volcan Aso. En se dirigeant vers Kumamoto, on voit très distinctement la force des tremblements de terre. Le dernier a laissé des traces, des ponts et des routes pendant dans le vide. Tout a été reconstruit, mais on peut toucher du regard l’activité sismique et volcanique de la ceinture de feu du Pacifique. Le Japon est une terre de volcans et de tremblement de terre. Enfin, le relief se fait plus doux, les maisons se font plus nombreuses, la voie unique se double et des caténaires apparaissent. Nous retrouvons le Japon côtier, la ville de Kumamoto se dessine et c’est la fin de la ligne. Nous poursuivrons jusqu’à Kagoshima, la grande ville tout au Sud où l’on sent l’air des tropiques.