
L’Estonie (1ère partie)
Les trois pays baltes s’affranchissent de leur encombrant voisin
L’Estonie est le plus septentrional des trois pays baltes. Avec ses deux autres compagnons, ils se sont affranchis du « grand frère » soviétique en 1991 après deux années de processus et de manifestations déterminées et plutôt pacifiques. Leur détermination ainsi que la résistance déterminée et acharnée des Baltes ont participé à la chute de l’Union des républiques socialistes soviétiques. Tout le monde se souvient encore de l’immense chaîne humaine forte de 2 millions de Baltes et longue de 600 kilomètres. Ce serait une grave erreur de réduire l’identité balte à une sous-culture mi-slave, mi-scandinave. À plusieurs égards, on retrouve quelques caractéristiques belges, ils sont entourés de grands pays qui se sont partagé ces territoires au fil de l’Histoire. Ils se retrouvent au carrefour de plusieurs influences qui forgent une identité propre et forte.

On pourrait croire que la vie y est douce et insouciante. Ce calme est trompeur, le voisin russe se réveille. Il est loin le temps où les habitants de Tallinn remerciaient le Président russe de l’époque (Boris Eltsine) pour son rôle actif dans un « divorce » à l’amiable et une transition pacifique vers l’indépendance. Le bruit des bottes se fait entendre, de petits symboles orange et bleu de la défense civile renseignent l’abri le plus proche en cas d’attaque aérienne ou de bombardements. La société tout entière soutient ses forces armées et de réserve. Dans le domaine de la culture, dans de nombreuses chaînes d’alimentation ou dans la restauration (et la liste n’est pas exhaustive), on offre des avantages aux militaires. Tous les moyens sont bons pour soutenir l’armée et y attirer les recrues. Ici, la menace russe est vécue de manière directe et palpable. Il me semble que, pour une grande partie du pays, les forces armées sont soutenues et encouragées par la société civile.

En effet, les occupations successives des Allemands et des Russes n’ont pas laissé de bons souvenirs. Entre déportation, tortures, exil, tentative d’annihilation de la langue et de la culture par l’envoi massif de population russophone ou par la déportation des populations locales (aujourd’hui, 38 % de la population est d’origine russe), les pays baltes ont tracé leur chemin vers la liberté durant près de 40 ans ! Ils ont appris à vivre à côté de leur encombrant voisin. À l’heure actuelle, les régions où cette minorité est majoritaire dans la population (principalement près de Narva) pourraient être revendiquées par le voisin comme un territoire russe, puisque principalement habitées par des russophones. Ce ne serait pas la première fois que l’argument serait utilisé comme casus belli.

Après trente années de liberté recouvrée, les pays baltes sont aujourd’hui des membres de l’Union européenne, de la zone euro, et de l’OTAN. Qu’il est loin le temps des vieilles « Lada » de fabrication soviétique ! Ils espèrent que ces alliances commerciales et militaires protègeront leur intégrité tant territoriale que culturelle.